Auteur/autrice : Samuel Monnard

3ème jour de jeûne

Bon sang que j’aime le matin, cette énergie, cette journée entière devant moi !

Vous savez, aussi longtemps que portent mes souvenirs, le matin est délicat. J’ai toujours eu cette lourdeur qui me donne juste envie de me rendormir. Mais depuis quelques années, mon dos me fait mal le matin, alors se rendormir c’est difficile. Alors je me lève et il me faut quelques pas pour que mes pieds se décrispent, que mes articulations redeviennent presque fluides. Je n’arrive pas à manger ensuite, il me fallait attendre, parfois 30 minutes, voir 60 minutes et puis j’ai découvert le jus de citron dilué dans un grand verre d’eau tiède. Cela m’a permis, d’une certaine manière, de tenir encore un peu.Finalement, je me suis demandé si cela était normal à 36 ans d’être tout rouillé que ce soit au niveau digestif et physique.

Le pratique du jeûne m’informe de deux nouveaux éléments. J’observe deux phénomènes.

Le premier est l’absence de courbature au réveil, pas de cheville douloureuse lors des premiers pas, pas de douleur au bas du dos. Le second est plus basique, c’est l’absence de lourdeur. Certainement dû au faite que je ne me nourris plus avec de nouveaux aliments mais que mon corps se content de puiser dans mes réserves de graisses.

Ces prochains jours, je vais observer ces deux points car c’est plutôt particulier et encourageant. Est-ce que certains aliments produisent des courbatures ?

2ème jour de jeûne

Le jour qui suit la purge est particulier car je sens que mon corps est vide de nouveaux aliments. Une énergie particulière s’est installée et le matin, je ne ressens plus cette lourdeur dans le ventre que je traîne depuis … depuis très longtemps (trop longtemps). Après la tisane, il est temps de se mettre en route avec les activités de la journée.

Mais avant tout, j’ai envie de savourer cette tisane. Ce qui me semblait être un geste répété est un renouveau. Est-ce que c’est le faite que ce soit ma seule distraction de « nourriture » qui donne à cet instant cette particularité des premiers jours de vacances, de ces matins quand on a le temps de tout ? Pour le moment, je ne juge pas, je découvre car cette sensation bien que familière est aussi nouvelle.

Pendant le jeûne, il s’agit de bouger. Selon mes lectures, un corps qui bouge pendant le jeûne, travaille physiquement et transpire, cela permettrait d’évacuer de meilleures façons les toxines. Il y a plusieurs façons de le faire. J’ai même lu que des sportifs de hauts niveaux s’entraînent  et battent parfois leur propre record pendant cette période où le corps se nourrit de ses réserves. De mon côté, je ne vais pas faire des excès mais plutôt profiter de reprendre là où j’en étais lorsque ma santé et mon poids corporel me permettait de me sentir bien.

Le matin, je me programme 30 à 60 minutes de yoga, 15 minutes de musculations sans matériel et l’après-midi, un tour d’une heure. Ce dernier est salutaire pour mes maux de têtes !

1er jour de jeûne

C’est le jour d’élimination.

Au matin de ce 7 décembre, je me lève pas trop tôt. Il est tout juste 8h10 quand, après avoir bu une tisane, je prends le train pour la ville. L’énergie qui m’habite est juste bien pour supporter de rester debout dans le train et dans le métro. Marcher par contre, c’est agréable. Malgré le froid, la destination est la bonne. Une fois rentré, il est temps de passer à la purge car il est 9h30 !

Comment expliquer une purge au sel de sodium ? La question est toujours d’actualité. Une heure après la prise du sel, mon corps demande à se vider. Il faudra attendre les alentours de midi pour ce soit terminé. Deux thés à la menthe entre temps, ont aidé à freiner l’entrain dantesque de mes intestins à tout rejeter sans compris.

A midi, j’ai droit à mon premier jus de fruit biologique (avec seulement des vrais fruits, sans sucre, sans colorant, sans arôme). L’après-midi, je fais une sieste avec une bouillotte sur le foie. Puis, je pars me promener, une heure. Je travaille un peu et puis je prépare le bouillon pour les 5 prochains soirs.

Un kilo et demi de légumes préparés plus tard, je lance la cuisson, sans sel s’il-vous-plaît. Une cuisson lente, juste mijotée. J’en extrairai le jus et garderai que 20% des légumes à réduire. Au final, un repas du soir, c’est 3 dl de bouillon et 60 g de légumes en purée. Cela ressemble à de l’eau dans lequel on aurait mis un peu de couleur de l’automne, mais très vaguement en faite.

Le soir, je commence à avoir mal à la nuque et à la tête. C’est particulièrement pénible. Je vais essayer de dormir.

 

Jour de transition

J’y suis. Je suis prêt avec toutes mes affaires: mon tapis de yoga, mon pantalon et mes chaussures de marche, un bon vieux training confortable, un carnet, un crayon et le livre « L’art de jeûner ».

Ce premier jour, je m’alimente d’un seul aliment. On appelle cela une monodiète et j’ai choisi le riz. Hier soir, j’ai donc préparé mes trois repas du jour, soit 50 g de riz cru complet, 300 ml d’eau et c’est tout. Cela donne au final, une fois cuit, 50 g de riz cuit par repas.

Pendant cette journée, mes humeurs changent rapidement. Je travaille un peu, du moins j’essaie, car à chaque obstacle rencontré, j’aimerais mangé quelque chose. Les mandarines me font des clins d’oeil. Ce n’est pas la seule chose qui me manque, un bon café serai bienvenu. Petit à petit, les habituelles heures de travail se transforment en sieste, regarder un film, bouquiner dans le lit.

Je sens que tout est instable, non pas dans mon corps mais dans les humeurs qui accompagnent les besoins physiques et mentales. Vers 16h, je m’habille chaudement. Je me rends à la pharmacie de Cheseaux pour prendre un commande passée la semaine précédente. Au guichet, on m’annonce que cela n’arrivera pas avant vendredi ! Je sens la colère monté, je me calme (du moins j’essaie) et je réponds que ce ne sera pas nécessaire.

Ce dernier obstacle me fait vacillé. Je rentre en me demandant comment cela pouvait arriver maintenant alors que j’avais tout prévu à l’avance. En rentrant, il faut faire un choix. Je sens que cette réflexion est de trop. Pourtant, si je me tiens à la technique proposée, une purge est nécessaire. Où trouver du sel de sodium (ou sel de Glauber) ? Je contacte une autre pharmacie, réponse négative, je fais une pause. J’en appelle une autre, réponse négative aussi. Le schéma est identique. Je décide alors de laisser tomber le classement de google. Je vais m’adresser à une petite pharmacie de quartier (qui n’appartient à aucun groupe). Bingo ! La personne me répond qu’elle en a en stock. Je demande de m’en réserver. Elle me rassure en mentionnant la quantité en stock.

A 16h53, je me sens bizarre, fatigué, mais je sais que demain matin, je pourrais me rendre en ville chercher le sel.

Ressenti à l’approche du voyage

Demain est le 1er jour d’un nouveau voyage dans lequel je me suis engagé de commencer… il y a quelques semaines.

Tout au long de cette journée du 5 décembre, j’ai senti en moi les frémissements, à la fois l’excitation et la peur, le ventre se nouer, les jambes perdre leur force, avoir peur. La peur a le même visage et les mes discours que lors des voyages précédents. C’est un seulement un peu moins loin physiquement. Mais n’est-on pas toujours un peu loin de son corps physique lorsque les émotions prennent le dessus ?

Il y a quelques minutes dans le métro, sur mon visage, se lisait ce sourire ineffaçable. Quand bien même, j’aurais voulu le cacher, ce n’était pas possible. Je n’en sais rien ce qu’on voit quand on me regarde dans ces moments-là. L’autre jour je racontais à une amie que j’imaginais parfois que quelqu’un me regardait avec admiration, comme si le faite d’écrire un journal avait une sorte de charme en soi. En tout l’écriture provoque quelque chose. En dedans il y a de ces choses que je peine souvent à ressentir avec les gens, même proche. Ces petites choses à l’intérieur est un savant mélange de chose qui transforment le plus mauvais des sentiments en une effervescence de pétillements, de naïveté sûrement, de chaleur, de rire et d’une sorte de vibration qui donne le vertige et provoquent des fourmis dans les pieds. Tu vois comment ?

Ce qui est certain, c’est qu’il faut, pour le ressentir, laisser toute forme de jugement, de rationalité et de méchanceté envers soi-même. Ce sentiment perdure, tant que ces points sont respectés.

Photo: prise par Adrien pendant la traversée des Pyrénées en 2009. Le sourire ineffaçable.

Pensées éparses

Je crois que mon cas demande un peu plus de flexibilité… ne serait-ce qu’accepter que le contact humain est difficile depuis des années (toujours ?). Dans ces moments-là je pense à Myriam (www.myriamduc.ch) qui accepte les règles de ce monde tout en créant les siennes.

Je pense à de nouvelles questions à lui poser.

De quoi as-tu le plus peur ?
Si tu ne pouvais plus faire de sport ?
Si tu ne re-devenais celle qui était nulle ?

Les murs, j’en crée parfois avec la musique, l’écriture ou mon portable. Ce dernier, vous le connaissez bien, pas vrai ?

Avant le portable je me réfugiais dans mes interprétations personnelles du monde, mes histoires, autant de zones dans lesquels je pouvais être ok avec le fait que tu sois trop proche de moi, que vous êtes tous trop proche, trop nombreux.

D’où me vient l’idée de jeûner ?

La première fois vous voulez dire ? De mon corps. Cette réponse en fera rire plus d’un et pourtant… c’est la première réaction d’un corps malade, nous n’avons pas faim, nous sommes fatigués, nous voulons dormir mais surtout pas mangé. Cette expérience m’est arrivée des dizaines de fois et autant de fois que la maladie s’est invitée dans mon corps (personne, à mon avis, a eu un jour envie d’inviter la maladie, sauf peut-être petit quand on ne veut pas aller à l’école).

Ce n’est pas de la maladie dont m’est venue l’idée de commencer un jeûne. Non, il s’agit plutôt d’un besoin qui s’installe avec les années, en sentant ces nouvelles douleurs aux articulations, cette sensation de fatigue chronique, en mangeant rapidement de plus en plus souvent et… en ayant fait le choix de me séparer de la cigarette. Je sens bien que mon corps est toxique. Tous les indicateurs sont au rouge, de la tanspiration, de l’haleine, des douleurs au début de la journée, des maux de tête,de ce besoin permanent de manger des repas de plus en plus salés, épicés. Je n’ai pas oublié le sucre et je me remercie de ne pas avoir ajouter celui-là à mes addictions et compensations.

De plus, quand mon médecin ne trouve pas de problème en particulier à soigner et que la seule invitation est une séance chez un psychologue (chose que je fais fais régulièrement déjà)… A 36 ans, je me dis que c’est sûrement lié à l’âge, que c’est normal d’avoir la sensation d’un frein en permanence tiré, mais non … Je regrette ceux qui se mettent ces idées en tête. La seule expérience du yoga m’a indiqué que je pouvais me sentir plus en forme à 36 ans qu’à 26 ans. Certes je ne serai probablement plus un champion de boxe dans la catégorie poids lourd mais en terme de légèreté, je suis persuadé que mon corps mérite mieux.

Donc l’expérience du jeûne n’est plus à faire, elle a déjà eu lieu à maintes reprises et cela, c’est sans compter le jeûne que nous reproduisons chaque nuit. Combien de personne parmi vous n’ont pas faim le matin, ne déjeune pas au saut au lit ? Je vous donner l’info, vous êtes en train de jeûner.

Comment apprendre à aimer les livres ?

Le mot livre. Rien que ce mot évoque chez moi toute une histoire. Je vais vous la raconter avec les souvenirs qu’il m’en reste aujourd’hui.

A l’école primaire, je me rappelle avoir lu quelques livres. C’était toutefois des devoirs sur lesquels, nous devions exposer au reste de la classe son histoire. Ces exposés étaient angoissants d’une certaine manière, car je me rappelle toujours avoir eu très peur d’être devant toute la classe. Mais de l’autre, c’était un moment privilégié où toute l’attention reposait sur le héros de mon histoire, rien que le mien tout seul. Ce héros auquel je finissais par me condondre était aussi réel que vous et moi. Puis les questions du maître se pressaient au portique de mon monde et je revenais brutalement dans la réalité. Pas de loups hurlants sous la lune, de feu de camp dans la forêt sous la neige, ni de bâteau dérivant vers le large, d’orarge au milieu de l’océan, ni encore comme seule préoccupation vivre chaque instant comme s’il s’agissait du dernier.

Ce n’est cependant pas cette période où ma soif de lecture s’imposa. Ce n’est que quelques années plus tard que les livres ont pris une place importante (encore aujourd’hui).

A l’âge de 15 ans, juste avant l’été 1996, ma principale quête n’était pas de vivre pleinement mes dernières vacances d’étudiants, ni encore de préparer la rentrée en tant qu’apprenti employé de commerce. Bien que cette dernière aurait pu me tracasser au plus haut point – comme tous les changements de cet ordre – elle demeura en seconde ligne.

Juste avant l’été 1996, ma principale préoccupation était de connaître l’amour, celui dont tous mes camarades semblaient avoir déjà connu depuis l’enfantine. Oui, oui, il me semblait que c’était quelque chose que tous les autres avaient expérimentés. Juste avant l’été, on m’avait remis une lettre ou décrit verbalement, je m’en souviens pas très bien. Mais ce qui fût le plus alarmant est que ces mots parlaient d’amour, Amour avec un grand A. Quelqu’un s’intéressait à moi et plus particulièrement une fille, ce qui m’avait laissé d’abord sans souffle puis petit à petit une sensation extraordinaire d’enthousiame pour la vie dans son entier.

Cette histoire commença par une pièce de théâtre (pardonnez-moi pour les détails, l’attention n’y était pas) et le fameux message. Ce soir-là je fis la connaissance de la source de ce message et également du début d’une histoire qui me hantera des années durant.

Je fis alors la connaissance de la messagère et une fois la pièce terminée, je la raccompagna chez elle (dans sa famille). Dans les bras une grosse caisse en rodin pleine des décors de la pièce de théâtre (sûrment que cela devait être cela). Elle habitait un château et ce n’est pas le fruit de mon imagination débordante ! Vous rappelez-vous des soirées où les discussions pouvaient de s’étirer à n’en plus finir. Cette soirée en était une. Ce n’est que bien plus tard dans la nuit que je rentrais chez mes parents et reçu les foudres de ma Maman qui s’était inquiétée de cette soudaine disparition.

Quelques semaines plus tard, amoureux et aveugle. Il semble que ces deux mots vont très bien ensemble, n’est-ce pas, je rentrais avec un livre de Shakespeare, un livre que m’avait remis ma muse et demandé de le lire. Elle souhaitait que je le lise afin que je lui raconte l’histoire et qu’à son tour elle le raconte à sa maman. Le but final m’est aujourd’hui un peu flou. Mais quoiqu’il en soit, je revins à la maison avec un livre de Shakespeare avec la ferme attention d’honorer ma promesse. Tel un petit chevalier (je devais sûrement m’échapper dans ce rôle-là), le livre à la main, commença une nouvelle aventure.

Notre histoire fût consommée aussi vite que quelques carrés de chocolat. Mademoiselle la princesse quérit un nouveau chevalier et moi, je fis l’acquisition d’une carte de membre à la bibliothèque municipale de Vevey.

Au fond, là tout juste là

La fraîcheur de l’air après la pluie. Dans le noir devant, le ciel au-dessus. Là-haut des milliers d’étoiles resplondissent. Ici bas, un café abandonné sur la petite table. Un frisson des pieds à la tête. Mon corps se raidit et se décrispe d’un coup.

Surgit alors, comme si de nul part, de l’anéantissement de toutes les tensions accumulées de semaine en semaine, chacune ayant sa propre histoire, tel un château de cartes… j’inspire… Dans le receptacle de l’univers s’ouvrant devant mes yeux, là-haut dans le ciel étoilé… 

Je m’égare à nouveau. Un deuxième frisson me parcourt. Mes yeux se remplissent instanément et cette fois, c’est chaud. Je suis remplis d’une chaleur bienveillante.

Et c’est ainsi que j’écris. J’espère qu’il n’est pas trop tard pour lancer un appel d’Amour à tout ceux qui me liront. Laisser juste un message d’amour, sur un bout de papier à qui ne s’attendra pas, ce soir ou demain matin, à recevoir un tel message, mais pas plus tard car le temps est précieux.

Une vie, c’est tout au plus, 80 printemps, 80 occasions de fêter son anniversaire, 80 occasions de regarder les feuilles tomber en automne, 80 premiers jours de l’été et des terrasses. Et lorsqu’on est malade bien plus tôt que prévu, cela peut devenir très court, très très court.

Il suffirait, pour éveiller ce genre d’acte, de pas grands choses. Je sais toutefois que parfois, il est bien difficile de le ressentir, par peur de souffrir (qui est la mienne), par peur d’être juger, par peur de bien des choses ou par oubli. Alors il suffirait simplement de se souvenir d’un de ces moments où on a ressenti la chaleur d’une personne bienveillante (d’une mère aimante, de la présence d’un ami, etc). Un souvenir neutre car l’amour bienveillant est détaché de tout attachement à une personne. Seule la chaleur du souvenir compte, la sensation de sécurité. 

Et y travailler, jour après jour, juste quelques instants. Petit à petit, le travailler pour se rappeler à soi-même de s’aimer. Petit à petit, s’en rappeler lorsqu’une personne proche a besoin de réconfort. Petit à petit rapprocher de soi cet état avec les personnes moins proches. Petit à petit avec les personnes qui nous sont déplaisantes. Petit à petit au reste de l’univers.

Au fond, là tout juste là, est mon Coeur. Il est proche et pourtant si lointain. Proche car il a toujours été là. Lointain, car la carapace que j’ai construite tout autour, en même temps qu’elle m’en protège, m’en éloigne aussi.

Petit à petit, je défais chaque brique. 

Ben Howard et Sofia

C’était en décembre 2011, premier contact avec Sofia par le biais de skype.

Elle en Australie, moi en Suisse.
Elle dans la brousse en wwoofeuse chez Justin, moi dans la roulotte sous la neige.
Et c’est comme cela que Ben Howard a glissé dans mes oreilles pour la première fois !

En ce 12 juillet, une année et demi après l’Asie, nous nous retrouvons au Concert de Ben Howard au Montreux Jazz.

Made with Love @ 2017 Samuel Monnard